Pourquoi les grecs pratiquaient-ils la vénération du phallus ?

Capables de repousser les mauvais esprits, de porter chance, objet de célébrations, et de déification, la vénération du phallus avait (déjà !) lieu dès l’Antiquité. Mais cette célébration du sexe masculin ne peut-être réduite qu’à une expression de la sexualité. Au contraire, elle revêt des significations plus profondes liées à la spiritualité, la fertilité, la protection… 

La vénération du phallus dans la mythologie

Aux origines du culte phallique, on retrouve un lien direct avec la mythologie grecque. Chez les Grecs, le phallus est toujours uni au culte d’un dieu, souvent celui de Dionysos : dieu de la vigne et du vin, de la fête et ses excès, mais aussi du théâtre, et surtout de la semence et de la fertilité. 

À la source de ce lien, on retrouve une fable écrite par les prêtres liés au culte de ce dieu : ayant perdu sa mère Sémélé, Dionysos se met à sa recherche et va jusqu’aux enfers pour la trouver. Pour l’accompagner dans ses recherches, il demande l’aide d’un guide nommé Prosymnos. En échange, Prosymnos, tombé amoureux de Dionysos, accepte de le servir contre des faveurs sexuelles. Mais Prosymnos mourut en chemin. Dionysos, désireux de tenir sa promesse malgré tout, lui éleva un tombeau. Il fabriqua un phallus à l’aide d’une branche de figuier qu’il plaça sur la tombe de Prosymnos, avant de s’asseoir sur la pointe de celui-ci pour ainsi s’acquitter de sa dette.

C’est pour cela que l’on retrouve des représentations phalliques liées à Dionysos. Son culte public, par exemple, donnait lieu aux fêtes des “Dionysies. Ces fêtes consistaient à porter en procession des représentations géantes du membre masculin à travers toute la ville, en l’accompagnant avec des chants. L’objectif était de prier pour la fertilité des champs. 

Vénération du Phallus sculpté à l'entrée du temple de Dionysos à Délos
Phallus sculptés à l’entrée du temple de Dionysos à Délos

Ce n’est donc pas une coïncidence si Dionysos est le père de Priape. Né de sa liaison avec Aphrodite, déesse de l’amour, Priape est le dieu de la fertilité pour les Grecs et les Romains et est représenté avec un gigantesque phallus en constante érection. 

La dimension culturelle du phallus chez les Grecs et les Romains

Au-delà de son aspect religieux, la vénération du sexe masculin était inscrite dans la culture grecque et romaine comme un élément de la vie courante. On prêtait aux représentations phalliques des vertus apotropaïques, c’est-à-dire qu’elle visait à repousser le mauvais-œil, les mauvais esprits. 

Pour cette raison, Grecs et Romains ornaient leurs devantures de maisons de phallus sculptés au-dessus des portes. On en retrouve aussi autour de temples ou de monuments célèbres. 

Cette fonction de protection se retrouvait également dans les fascinum : une amulette en forme de pénis que l’on portait autour du cou, notamment chez les enfants romains, là encore dans un but de protection et de porte-bonheur

Fascinum retrouvé à Pompéi de vénération du phallus
Fascinum retrouvé à Pompéi

Cette pratique reflète une croyance profondément enracinée dans le pouvoir symbolique du phallus en tant que source de vie et de protection, transcendant ainsi les limites de la sphère religieuse pour devenir un élément essentiel de la culture quotidienne.

L’expression artistique et symbolique du phallus 

Les phallus étaient également des sujets récurrents dans l’art gréco-romain. Des sculptures phalliques aux fresques suggestives, ces représentations étaient souvent intégrées dans des œuvres artistiques pour célébrer la vie, la sensualité, et la fertilité

On retrouve des symboles phalliques un peu partout dans l’art gréco-romain : bijoux, sculptures et bas relief, fresques, vases, lampes, etc..

Dans de nombreux cas, le phallus était représenté de manière ludique ou humoristique. Il soulignait une approche plus décontractée de la sexualité dans ces sociétés. Cette dimension symbolique de l’art phallique servait à normaliser et à célébrer la sexualité, là encore dans le but d’éloigner le mauvais-œil. 

Statuette de vénération du Phallus
Statuette en terre cuite, Myrina, Ier siècle av. J.-C. Dans la comédie romaine, les esclaves sont souvent représentés avec un sexe surdimensionné.

L’arrivée du christianisme comme religion dominante en Europe a restreint la vénération du phallus à l’acte sexuel. Il lui attribuait une nature obscène. Le christianisme a supprimé les représentations des phallus à cause de leur caractère païen.

Ainsi, la vénération des phallus chez les Grecs et les Romains était un phénomène complexe, mêlant des éléments religieux, culturels et artistiques. Le phallus était bien plus qu’un simple symbole sexuel, il représentait la vie, la fertilité, et la protection divine.

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